Première sortie dans la ville, premier échec. [PV Melyna]

- Non... Il doit bien y en avoir un quelque part... Aller, juste un, un tout petit, même s'il fait cent pages, ou moins ! C'est pas possible. Mince... Je vais être obligée de sortir pour me ravitailler. Je déteste la foule !

Melyna, d'ordinaire calme et silencieuse, faisait les cent pas dans sa chambre qui était sienne depuis quelques jours à peine. La jeune londonienne était, en effet, arrivée dans son nouveau lieu d'étude assez récemment, et avait donc quittée son ancienne ville, tout comme son ancienne vie. Qu'est-ce qui pouvait bien la mettre autant sur les nerfs ? Ah oui, il en fallait beaucoup pour la perturber à ce point-là. Quelques mèches de sa longue crinière noire étaient retombées sur son visage, qu'elle replaça d'un geste distrait et machinale, assez nerveusement. Rien que l'idée de sortir de sa chambre l'horripilait. Non, elle n'était pas agoraphobe, pas le moins du monde, même. C'était juste que... Elle détestait le bruit de la ville, l'incivilité des citadins, elle révulsait la simple idée de demander un renseignement à une quelconque personne. Ah, le silence représentait une bien meilleure compagnie, du moins c'est ce qu'elle pensait. Peut-être était-elle en tort ? Sans doute. Mais malgré tout cela, malgré toute l'aversion qu'elle éprouvait, elle se trouvait dans l'obligation de sortir. C'était juste vital. Elle n'avait plus de quoi lire. Non, ne rigolez pas, c'est très sérieux. Melyna adorait se cultiver, lire toute sorte de bouquins, surtout en matière de psychologie. Mais voilà, elle avait finit tous les livres qu'elle avait achetée il y a quelques jours, dès son arrivée. Ce besoin de se plonger dans un récit fictif ou scientifique était aussi omniprésent que n'importe quel autre besoin, celui de manger, ou bien de dormir par exemple.

C'est ainsi que la jeune femme aux yeux émeraudes se décida enfin à sortir. Elle cessa de tourner en rond tel un robot soigneusement programmé pour aller se changer. Elle enfila son slim noir en cuir, surplombé par un tee-shirt blanc où un motif en forme de crâne jonchait le centre de ce dernier. Ce même tee-shirt était caché par la veste noire que Melyna décida de porter, en cuir également, où était incrusté des clous dorés au niveau des épaules. Elle orna son cou d'un joli pendentif en or, et termina par quelques bracelets, cloutés eux aussi. Oui, la jeune femme avait son style, qui aurait pu paraître banale mais qui paradoxalement, sortait de l'ordinaire. La londonienne laissa ses cheveux lâchés, les coiffants soigneusement. Ils étaient incroyablement lisses, si bien qu'en quelques coups de brosse à peine, elle fut prête. Après avoir mit ses chaussures, elle se parfuma de quelques gouttes florales habituelle, puis quitta sa chambre.

Melyna se dirigeait donc vers une petite librairie qu'elle avait vue à son arrivée. Elle évitait le plus possible de trop s'approcher des passants, qui étaient comme emprunts d'une curiosité malsaine. Sa démarche était presque impériale, son éducation en était la principale cause. La jeune femme arriva enfin dans cette librairie bien loin d'être un lieu opulent. Sous les conseils du libraire, elle prit une dizaine de livres d'un peu tous les genres. Science fiction, polar, horreur, fantastique, ou bien des essais de psychologie, ou encore des libres sur l'astronomie ou des biographies d'auteurs célèbres. Une fois sortie, un sac plein de livres à bout de bras, elle s'apprêta à faire le chemin du retour. Repassant dans la petite ruelle qu'elle avait empruntée plus tôt pour se rendre dans la librairie, elle vit un jeune homme, adossé contre un mur, semblant très obnubilé par son téléphone portable. Et pourtant, il avait l'air un peu dépaysé, et était vêtu d'une drôle de façon. Bon, elle-même avait un look un peu étrange donc elle n'avait strictement rien à dire là-dessus. Et puis, la vie de cet inconnu ne la regardait pas. Peut-être pourrait-elle l'aborder pour vérifier s'il n'avait besoin de rien ? D'un côté, sa nature gentille et généreuse la poussait à aller le voir, et d'un autre, il y avait cette attitude de je-m'en-foutiste et de médisant qui lui intimait de continuer son chemin sans se soucier des autres. Finalement, elle décida de se diriger vers cet inconnu qui n'avait pourtant rien demandé, juste pour s'assurer qu'il ne s'était pas perdu, ou bien pour savoir s'il attendait une quelconque personne. C'était juste l'affaire de deux secondes, et ainsi elle aura bonne conscience. A moins d'un mètre du jeune homme, Melyna pencha doucement la tête pour qu'il lui accorde un semblant d'attention, puis prit la parole :

- Excusez-moi, tout va bien ? Vous... attendez quelqu'un ?

La londonienne se maudit d'avoir prononcé ces phrases, aussi stupides les unes que les autres. Et pourtant, elle ne pouvait pas faire marche arrière. Sans compter que son éternelle timidité refaisait automatiquement surface, bien qu'elle n'en montra aucun signe extérieur. Elle observa l'inconnu de ses prunelles émeraudes, attendant, si possible, une réponse rapide.

- Et bien en fait... je suis... Comment dire...? Perdu. Oui, je sais que ça peut paraître stupide de se perdre comme ça mais je n'ai pas un bon sens de l'orientation... Mais sinon tout va bien.

Melyna ne savait pas trop comment réagir. Oui, cet inconnu était effectivement perdu. Et maintenant ? Soit elle le laissait en plan, soit elle prenait la peine de l'aider, car la jeune femme avait beau être quelqu'un de plutôt renfermé, elle n'était pas non plus un monstre, c'était même tout le contraire, à vrai dire. Elle afficha une moue soudainement tristounette, gonflant un peu les joues telle une enfant. L'inconnu aux beaux yeux vairons laissa échapper un léger rire, alors que Melyna plongeait dans une grande réflexion, rajustant une énième fois une mèche de cheveux qui était venue encombrer son visage.

- D'ailleurs je ne me suis pas présenté, je m'appelle Akira Katsu, et toi?

La jeune femme était partagée entre timidité et compassion, elle avait tout de même un peu de mal à parler aux inconnus, car elle ne sortait pas beaucoup de chez elle. C'était quelque chose d'assez problématique. Pourtant, aux premiers abords, rien qu'à en juger à sa démarche et à son expression déterminé, on pourrait se dire que cette fille n'avait aucun problème de timidité. Malgré tout, elle ne laissa rien paraître (ou tout du moins elle tenta de se comporter normalement) et répondit à son interlocuteur :

- Vous êtes arrivé récemment ici ? Vous savez, c'est normal de se perdre quand on n'a pas pris ses repères, cela n'a rien de stupide, avait-elle dit en souriant légèrement, regardant Akira d'un oeil complice, enchanté Akira, Je me nomme Melyna Nightmare.

La jeune femme à la chevelure de jais reprit son air sérieux habituel, puis se rendit compte qu'elle avait continuée à vouvoyer Akira involontairement. La force de l'habitude... Tant pis, elle continua donc sur sa lancée, poussée par son élan de compassion et de générosité.

- Vous avez soif ? Je peux vous offrir un verre, si vous le souhaitez. Et je peux toujours vous aider à retrouver votre chemin... On aura qu'à dire, que c'est ma bonne action de l'année !

De nouveau, un sourire vint orné son visage, vite suivi d'un petit rire qui fut bref mais emplit de gentillesse et d'auto-dérision. Oui, il était rare pour Melyna de se comporter de la sorte, mais elle avait fait tant d'effort pour sortir de sa chambre sombre, alors pourquoi ne pas continuer dans cette voie là ?